Charles Mazé et Coline Sunier cultivent un graphisme sensible au document. Ils viennent de reprendre la suite prestigieuse et inventive des catalogues du prix Fernand Baudin dont il faut, une fois de plus, saluer la qualité, la vitalité et l’exigence.
Urs Lehni avait, l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente, plutĂ´t parlĂ© du jury et de ses dĂ©libĂ©rations — retranscrites in extenso – que des livres primĂ©s dans un petit livre ingĂ©nieux et littĂ©raire, Charles et Coline poursuivent l’extension du domaine du catalogue en s’attachant Ă la personnalitĂ© attachante de Fernand Baudin, figure tutĂ©laire de l’évĂ©nement.
Le catalogue 2013 est donc scindé en deux parties dont la part belle est laissée au typographe, enseignant et théoricien belge. Un léger tiré à part épouse avec un protocole strict les livres salués. On reproduit, échelle 1, la première, une double intérieure, puis la quatrième de couverture. Mais surtout on épouse l’esthétique du carnet de notes cher à ce spécialiste de la typographie dans ce qu’elle peut tenir de l’écriture.
Car le morceau de choix réside dans un dossier — du genre de ceux qu’il réalisa avec John Dreyfus et Remy Magermans pour l’École de Lure : une compilation épaisse des manuscrits, épreuves de correction, tapuscrits et autres échanges épistolaires de l’ancien pédagogue flamand qui donnent en quelque sorte le ton à l’ensemble éditorial.
On a dit que Charles et Coline creusaient le filon d’un graphisme documentaire, au plus près des objets qu’ils relaient. On a noté comment leurs livres épousaient les matières qu’ils devaient décrire. Par l’adoption de protocoles voulus objectifs, par l’échelle 1, par la stratégie de l’empreinte et de l’indice : du signe tiré de l’objet même comme cette typographie qui rejoue le ductus caractéristique de l’écriture manuscrite, feutre ou stylo-bille, du vieux maître belge de la paléographie. Une esthétique des présences et de la fabrication des signes.
Mais peut-être sous l’influence du sourire de Fernand Baudin, leur attitude documentaire brille aussi d’une positivité un peu éloignée des positivismes âpres, pauvres, rigoristes ou élégamment distanciés souvent en vogue dans cette approche du traitement des matières informationnelles : comme une empathie, une sympathie documentaire.