La publication est étymologiquement liée à l’idée de place publique. Elle rend public. Elle rend au public. C’est-à -dire qu’elle est aussi le lieu de la manifestation des choses tangibles. Le lieu où l’on peut éprouver quelque chose de la place publique. Le site où peut se dégager un sentiment du lieu habité. L’endroit où peut s’habiter le lieu.
C’est peut-être ce genre d’idée, déjà travaillée par les Sgram – Système Graphique de Relation Au Monde – de Christophe Jacquet, autrefois dit Toffe, ou par les pensées nomades, choses imprimées de Michel Aphesbero et Danielle Colomine, qui a animé Olivier Lebrun, lorsqu’il a proposé, à l’occasion d’un Atelier de Recherche et de Création « Contre-Utopie » mené au couvent de la Tourette par un groupe d’étudiants et d’enseignants de l’Eesab de Rennes, la programmation de Cloche dans la prairie, Montag dans la forêt.
Cloche dans la prairie est le nom d’indien d’un dĂ©funt frère de Tourette que l’on peut voir dĂ©ambuler dans les bois environnants du couvent dans le documentaire « D’ombre et de lumière » de Marc Chevillot.
Montag est le nom inquiétant du protagoniste-pompier dans le Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, sans doute une référence aux autodafés du désastre nazi, peut-être une référence au Vendredi de Robinson Crusoé, éventuellement une référence oblique à l’architecte international suisse, pourtant très roman, qui a pensé ce lieu de méditation des forêts lyonnaises.
Cloche dans la prairie, Montag dans la forêt est le nom d’un exercice d’habitation sensible de l’espace plus ou moins construit, d’une action poétique programmée permettant d’éprouver un contexte dans la réalisation d’un texte, dans la construction d’un document édité.
Dans ce scenario procédural, les étudiants deviennent ces « hommes-livres » hommes libres du roman de Bradbury adapté au cinéma par François Truffaut : des symboles de la retraite isolés à la fois dans la nature et le lieu si virtuel des possibilités de résistance du texte.
Les étudiants s’imprègnent d’un texte choisi dans la bibliothèque du couvent jusqu’à ne plus faire qu’un avec cette topique fictionnelle qu’ils vont faire résonner dans un lieu spécifique des environs de l’édifice dans lequel ils prélèveront un objet.
Puis ils réfléchissent, ils documentent l’événement. Partant du livre, il y retournent. On les montre récitant. On montre leur vision de récitants. Enfin on expose leur prélèvement inséré dans le lieu symbolique du « carré de méditation » de leur cellule d’habitation…
Lectures et conception graphique : Anne-Lise Bachelier, Mikaëla Giry-Gonzales, Marion Papin, Alexa Perchemal et Marie Piccolin.