À la fin des années 60, Robert Barry aimait à produire des pièces ou des actions imperceptibles. Il dissipait des gazs invisibles dans l’atmosphère, diffusait des champs électromagnétiques, des ultrasons…
Quelque chose est là , mais son signifiant est inaccessible. En quelque sorte l’inverse de l’erreur 404. Ce n’est pas la ressource qui est indisponible, mais plutôt les leviers pour l’atteindre…
Un processus, non pas tout à fait de dématérialisation, mais de dissémination de l’œuvre selon le terme de Patricia Falguière (1), de rétention ou plutôt de suspension. De cette réthorique de l’hermétisme qui retarde la rencontre avec l’œuvre, qui oblige le regardeur à l’effort et à l’action par la consultation du biais d’une série de non sites selon le terme de Robert Smithson ou de hors-sites, notamment des documents iconiques mais aussi des écrits, des catalogues, des livres…
Dans Girl in a faraday cage, Stéphanie Gygax confronte les portraits aux écouteurs d’une jeune femme assise à l’arrière d’une berline, vraisemblablement une certaine Linda, à la playlist écrite d’un idéal de voyage. Also Frightened par Animal Collective, Let’s go away des Beach boys, Ford Mustang par Serge Gainsbourg, Autobahn par Kraftwerk…
Et l’on sent bien que la vérité de ces images, ou de leur montage avec la playlist textuelle qui leur sert de légende, est, comme on disait à la télévision, ailleurs… Par exemple dans la béance de l’impossible traduction de ces instants de télé-transportation musicale… Serait-ce à dire que l’art dit conceptuel a aussi insisté sur le caractère de refus sensible de toute proposition artistique, fut-elle bien tangible et iconique ?
Note
- 1_ Patricia Falguières, « L’exposition immatérielle. Notes pour une histoire » , in numéro spécial d’Art Press (n°21, 2000) Oublier l’exposition, p.60-64.