Flux

Pas de commentaires

Les affiches de Ikko TANAKA

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *



Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ikko TANAKA, Kanze Noh Play, 1981

Ikko TANAKA, Kanze Noh Play, 1981

Le japonisme Ă©chappe Ă  l’apprĂ©hension autant que le Japon : il propose un rĂ©pertoire de formes identifiables (soleil rouge, fleurs de cerisier, geisha, paravent, kanji…), mais renvoie Ă  une vision occidentale, un imaginaire d’expositions universelles du 19e siècle. Mais Ă  quoi tient son Ă©cart avec ses modèles ? Un effet de stylisation ? Une rĂ©duction incomplète ? Ă€ moins qu’il n’en diffère intĂ©gralement, absent de tout « esprit des formes Â» purement japonais ? Si le japonisme manque nĂ©cessairement le propre de la culture japonaise (et que le gaĂŻjin manque immanquablement), ne serait-il par l’occasion de l’affranchissement de tout modèle ? Car pour le gaĂŻjin, finalement, le japonisme, c’est une rencontre avec toutes les incomprĂ©hensions liĂ©es Ă  l’impossible saisie de la dimension sĂ©miotique, au profit d’une dimension mĂ©taphorique dĂ©liĂ©e.
 

Ikko Tanaka, Graphic Art Botanical Garden, 1990

Ikko Tanaka, Graphic Art Botanical Garden, 1990

Ce n’est certes pas le visiteur occidental de la rĂ©trospective des affiches de Ikko TANAKA du musĂ©e d’art moderne d’Osaka qui contredirait cette idĂ©e. Outre ce qu’il reconnaĂ®t d’images clichĂ©s identifiables visuellement (geisha, acteur de Kabuki, samouraĂŻ, et kanji) et ce qu’il aura lu en anglais ou français sur les affiches exposĂ©es, Ă  moins qu’il n’identifie des reprises par le maĂ®tre japonais de signes visuels iconiques de l’art occidental (ainsi l’affiche Bauhaus devenue fleur – Â« Graphic Art Botanical Garden Â», 1990), que saisit-il de la logique de l’œuvre graphique de TANAKA ? La non-maĂ®trise non seulement de la langue japonaise mais de la logique mĂŞme du système du kanji rĂ©duit-elle vraiment le champ de comprĂ©hension des affiches prĂ©sentĂ©es ?

Ikko TANAKA, Morisawa, 1986

Ikko TANAKA, Morisawa, 1986

Selon quelle logique fonctionne l’affiche pour Morisawa, les composants d’un kanji Ă©tant Ă©clatĂ©s sur la surface ? Le kanji est-il encore lisible ? Son Ă©clatement joue-t-il une polysĂ©mie ? Ou bien est-ce une pure composition visuelle ? On serait alors tentĂ© d’y voir autant de partitions de musique contemporaine, Ă  interprĂ©ter librement mais rigoureusement – ainsi les signes de l’affiche dessinĂ©e pour Toru TAKEMITSU (Music Today, 1985) : la musique matĂ©rialisĂ©e par un flux porte les indications Ă  interprĂ©ter. Des nouveaux kanji gĂ©omĂ©triques et colorĂ©s comme autant de notes ? Il n’est pas jusqu’aux aplats que l’on soit tentĂ© d’attribuer un sens ou aux corps que l’on tâche de lire comme autant d’élĂ©ments constituant un kanji.

Ikko TANAKA, Dance Today, 1975

Ikko TANAKA, Dance Today, 1975

C’est une exposition d’œuvres intransitives, sans messages, sans fonction autre que purement visuelle mais non informative, que le spectateur parcourt. Mais n’est-ce pas aussi pour cela qu’elles sont ici exposĂ©es ? Non plus annonces ciblĂ©es mais signes contemplĂ©s : est-il nĂ©cessaire de les comprendre pour les apprĂ©cier ? De ce point de vue, alors, cette exposition est du japonisme – y compris pour les japonais. Ce n’est plus la perte d’un modèle qu’il faut dĂ©plorer, mais renouveler nos capacitĂ©s de contemplation de l’œuvre : regarder une affiche comme un paravent, comme une calligraphie, comme une partition.

Ikko TANAKA, Toru Takemitsu, Music today, 1985

Ikko TANAKA, Toru Takemitsu, Music today, 1985

Ikko TANAKA, Toru Takemitsu, Maison de la Culture du Japon, 1997

Ikko TANAKA, Toru Takemitsu, Maison de la Culture du Japon, 1997

Les affiches de Ikko TANAKA sont comme la meishi (carte de visite) que vous tendra respectueusement tout nouvel interlocuteur. On croirait devoir y visualiser un nom, c’est une image qu’il faut lire. Et le gaĂŻjin de conserver la carte Ă  dĂ©faut d’en avoir copiĂ© les informations, quand le japonais conserve, de son interlocuteur, la façon dont son nom s’écrit — la prononciation d’un nom n’informe pas de l’écriture de son kanji. L’un garde une Ă©criture gĂ©nĂ©rique, l’autre un dessin spĂ©cifique. Mais il n’y a plus ici d’interlocuteur dont il faudrait lire le nom. L’affiche n’informe de rien : la libĂ©ration du signe de tout empire.

Ikko TANAKA, Nihon Buyo, 1981

Ikko TANAKA, Nihon Buyo, 1981


« The Posters of Ikko Tanaka Â», The National Museum of Art, Osaka, jusqu’au 19 juin 2016.

Meta

Entrevue

Beauregard