Peut-on dire de la dernière exposition que Christophe Lemaitre propose au Cneai, pour la 14e édition de ses expositions Super, ALBERS LEWITT COINTET, du 7 avril au 23 Avril, qu’elle poursuit l’entreprise qu’il semble cultiver, de brouillage des limites consacrées entre art et graphisme ?
Sans doute est-ce là le point de vue intéressé d’un amateur de graphisme. Un genre d’effet d’optique… Et d’autant que le travail de Christophe Lemaitre a quelque chose de contextuel. Qu’il joue avec les matières disponibles. Et que, souvent, ces matières premières, sont ces matières de médiation et de circulation que proposent les objets graphiques. À Pougues les eaux, les affiches de Fanette Mellier qui assume l’identité graphique du centre d’art, à Nantes, les magazines 02, partenaires de la Zoo galerie…
Au Cneai on recueille les ephemera, les livres d’artiste et ce que l’on y appelle des « œuvre media ». On apprécie les graphistes. On est moins crispés sur la définition de frontières bien étanches délimitant le vaste champ des écritures visuelles. L’exposition explore donc assez logiquement certaines marges du grand art, en l’occurrence des années 60, 70. Des formes dites mineures ou plus abordables de l’art qui, chacune à leur façon, rencontrent certains tours langagiers ou certaines vocations du graphisme. Une sorte d’accessibilité, des formats, des matières d’expression, des circuits de diffusion…
Des formes de circulation dont on aimerait qu’elles puissent donner une certaine idée du graphisme, qu’elles donnent certaines idées aux graphistes et pourquoi pas aux commanditaires.
Une collection réunie par Christophe Lemaitre, Pierre Leguillon et Aurélien Mole, de pochettes de disque que Josef Albers, ancien professeur émérite du Bauhaus, réalisa dans le début des années 60 pour le compte du label exigeant de Enoch Light, Command Records.
Deux wall drawings pour tous, ou plutôt pour amateurs, de Sol Lewitt, minimaliste conceptuel et ancien graphiste que Baldessari chanta si bien. Wall drawings pour amateurs, c’est à dire réalisables par n’importe qui n’importe où, alors que les projets détaillés aux consignes ramassées qu’il conçoit sont habituellement destinés à des espaces spécifiques et sont réalisés par de relatifs spécialistes, des assistants, des étudiants en art, des artistes…
Enfin l’accessoire d’une performance de 1979 de Guy de Cointet qui se trouve être une édition. ACRCIT, un journal auto édité en 1971 fidèlement répliqué pour pouvoir être consulté et dans lequel l’artiste inclassable confirme son amour des jeux langagiers et de la typographie.
Le tout emballé graphiquement avec soin et talent par le délicatement nommé Cruche Crew soit Agathe Nicolas, Elena Germain et Elsa Audouin…
Illustrations Aurélien Mole