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Pour la deuxième édition d’Open Books, une exploration de la représentation et de l’exposition de l’objet livre, Charlotte Cheetham et Sophie Demay ont invité Catherine Guiral, Brice Domingues et Jérôme Dupeyrat à réaliser une deuxième édition de leur Crystal maze, le samedi 10 septembre à 17h.
La parole est à Catherine Guiral, attention les yeux, ça réverbère et ça diffracte :
« Le Crystal Maze, franglisme assumé, est tout à la fois figure du dédale et des facettes, un labyrinthe de miroirs-reflets qui auraient la faculté kaléidoscopique de faire se métamorphoser le vaste territoire de l’édition en une myriade (pour ne pas dire constellation !) de choses vues, lues, rendues à un moment M.
Mais le Crystal Maze est aussi l’autre possible figure du fleuve, comme a pu la décrire Alexandru Balgiu dans son intervention enchanteresse de rouleaux d’écrits et de lectures-à -emporter. Fleuve sans fin et radicellique comme le signifie, à sa manière, Samuel Taylor Coleridge lorsqu’il parle de l’Alphé dans Kubla Khan Or A Vision in a Dream : A Fragment (1816). Dans ce long poème aux relents opiacés, les flots du fleuve sacré s’engouffrent dans le palais des plaisirs de Kubilaï Khan, à Xanadu. Ils se répandent ensuite dans des grottes insondables générant fatalement rigoles, mares, rivières et autres chemins dérivatifs ou stagnants qui sont la nature du Crystal Maze, marqué par le hasard, la libre association et la mauvaise foi !
Pour ce deuxième numéro Jérôme Dupeyrat, Brice Domingues et Catherine Guiral avaient défini un terrain d’exploration qui était un triple rebond sur le mot OPEN, qualificatif pris par Charlotte Cheetham et Sophie Demay pour décrire leur travail curatorial autour de la lecture et des livres. Une question de monstration aussi, qui est devenue pour le trio Mazien celle de la réplique, du double, du monstre et du faux. FREE, FAKE, FREAK, trois mots, trois facettes possibles pour assembler une FREEAKE LIB : montage à distance de revues, livres, objets, films, ayant chacun des inter-relations définissables lors du live au CNEAI, et ce au gré d’une improvisation « chaleureuse ».
L’occasion était aussi trop belle de ne pas concrétiser une partie de ces inter-relations, associations douteuses ou lumineuses, dans un journal de bord. L’envie s’est manifestée a posteriori d’une discussion entre Brice, Alexandru Balgiu et Catherine, autour d’un personnage mythique, faux Marquis mais vrai clochard maritime des bords du Mont Saint Michel. De fil en aiguille et d’histoire d’enlisement en sourire post-mortem, La Dédicace à L’Enlisé est devenue un newsprint de 8 pages remontant l’amusante conversation à trois qui eut lieu.
Métaphore de l’enlisement qui aura également provoqué la fabrication d’une vidéo par Brice. Une sorte de long phrase-séquence construite sur le principe UmbertoEcoien de « la dialectique continue entre la légalité d’une forme et l’initiative de ses interprètes, entre fidélité et égalité » (L’Œuvre Ouverte, 1962). Manière de signifier que le Crystal, avec ses faces multiples est principalement histoire de montage, de hasard et d’interprétation : en l’occurrence la revisitation de la submersion livresque dans Mange ta Soupe d’Amalric (1997).
La Dédicace à L’enlisé s’est vu adjoindre un suite, Film-Journal Non In Petto qui tentait la programmation incomplète, et partiellement invisible pendant le live du Crystal, d’une série de séquences de films qui reflétaient une autre figure (maritime itou) : celle de la sirène, donc de l’illusion ; du faux encore. Quoique. Surtout une façon de souligner, comme le dit Jérôme, que le Crystal cristallise et permet aussi l’auto-édition. Une trace avant la trace. Un éphémère comme guide. Le tout sous le patronnage inattendu de l’ours de Berne qui n’avait jamais aussi bien porté son nom ! Et qui, convention oblige, a permis, sans vergogne, de montrer le faux-fétiche de Tintin, le « doul » du Doulos, l’enlisement signé Deneuve du sculpteur-acteur Capellani, mais aussi d’apprécier sans retenue, les aventures de Jim McCool : cette autre dérive-fleuve d’un hommage de Xavier à l’Odyssée et au road-movie.
Et puis il ne faudrait pas oublier (entre autres !), les fausses-pièces, les livres-films et les films-livres, ces bobines de feuilletonnages pour Foires et Kinoras ; Pierre Menard, Wimbledon, la submersion, Borges ; la fiction et le jeu, Superman, les factographies, le voyeur, l’Alphé, Sebald, la Communication Company… Une liste forcément abyssale et non-exhaustive, que le dispositif du Crystal remonte en de nouveaux agencements qui n’étaient pas tout à fait ce qu’ils étaient au départ et plus ce qu’ils voulaient être à la fin. C’est le jeu ma pauvre Lucette !
Il n’était donc pas totalement innocent d’avoir cherché un patronage Wellesien pour ce second CM : F For Fake sous sa forme-fleuve de film-essai est aussi un Crystal. Un dédale visuel, littéraire et non littéral, d’où s’échappent des météores comme ceux projetés un samedi soir par Alexandru Balgiu, Xavier Bouyssou, Marcelline Delbecq, Brice Domingues, Jérôme Dupeyrat et Catherine Guiral. »
Je n’ai pas rĂ©ussi Ă dĂ©celer si entre ces mots et ces pensĂ©es labyrinthiques (qui ont l’air pour le moins intĂ©ressantes) se cachait beaucoup d’humour et de second degré… hĂ©hĂ© dur de dur Ă suivre quand mĂŞme.
Mais une fois couché sur papier, en parlant moins, ça peut même parler un peu plus